Lidl fait-il peur?!

Le géant de la distribution a assigné son rival allemand pour dénoncer ses publicités télévisées. Il estime que les produits promus ne sont pas toujours disponibles pendant 15 semaines comme l’exige la réglementation. Intermarché veut se joindre à lui pour faire condamner Lidl.

Verra-t-on bientôt un bandeau défiler dans les films publicitaires de Lidl avec un message indiquant que l’enseigne a été condamnée pour publicité mensongère? C’est en tout cas ce que demande Carrefour, son rival, qui l’a assignée devant le tribunal de commerce d’Evry. Le distributeur français entend faire condamner Lidl pour ne pas avoir respecté la réglementation sur les promotions à la télévision. Elle stipule que les produits promus doivent être disponibles dans tous les magasins et cela pendant 15 semaines d’affilée. Or tel n’est pas le cas selon les avocats de Carrefour qui plaideront au fond lors d’une audience fixée le 22 février. L’été dernier, Carrefour avait obtenu de faire suspendre leur diffusion, dans le cadre d’une procédure en référé. A présent, le groupe demande une réparation «en nature» du préjudice.
Intermarché veut aussi faire condamner Lidl

De manière très inattendue, sa démarche a reçu il y a quelques semaines le soutien de la chaîne Intermarché, qui souhaite s’associer à l’assignation en apportant des pièces au dossier. «C’est du jamais vu, peste Michel Biero, co-gérant de Lidl France qui voit là des manœuvres dilatoires pour freiner la dynamique de son enseigne. Nous avons fait les mêmes tests chez Carrefour et leurs produits n’étaient pas disponibles. Qu’ils continuent à s’amuser avec ça au lieu de faire du commerce.» Lidl affirme disposer d’une hotline qui permet aux clients de trouver le produit en promotion dans les magasins. Crème anti-rides à 2,99 euros, mixeur à 19,99 euros ou gants de sécurité à 6,99 euros…

Cette attaque témoigne de la dureté de la bataille que se livrent les enseignes de distribution en France. A défaut de pouvoir s’aligner sur les prix de la chaîne discount, souvent extrêmement bas, les concurrents sortent leurs griffes. Récemment, Intermarché a réalisé un spot publicitaire où l’on voyait un acteur faisant la grimace alors qu’il goûtait un produit de son rival allemand. «Quand Lidl fait tester ses produits par des comédiens, chez Intermarché, c’est vous qui testez», disait une voix off.
Une montée en gamme qui gêne la concurrence

En 2012, la chaîne, jadis hard-discount, a pris un virage stratégique majeur en décidant de monter en gamme. Depuis, elle ne cesse de gagner des parts de marché. Lidl a investi des dizaines de millions pour rénover ses magasins, agrandir son parc, et renforcer la pression commerciale. L’an dernier, selon le magazine LSA, ses investissements publicitaires ont progressé de 65% à 350 millions d’euros bruts, dont un tiers à la télévision. Et l’enseigne a recruté 350.000 foyers parmi ses clients. Certes, avec 5% de parts de marché Lidl est loin derrière Carrefour, mais elle vient chasser de plus en plus sur ses terres urbaines. En Ile-de-France, son réseau compte déjà 164 magasins. Ce sera le double dans 4 ans!
La semaine prochaine, la chaîne de distribution se paiera même le luxe, pour la troisième année consécutive, d’occuper un stand au salon de l’agriculture afin de rencontrer les agriculteurs et de promouvoir ses accords avec les filières. Sans craindre à priori de voir ses installations saccagées comme souvent les magasins de ses concurrents en France. L’enseigne est aussi devenue l’un des principaux vendeurs de vins de Bordeaux en France, proposant des grands crus comme château Pape Clément ou Yquem à l’occasion des foires automnales. A la limite de la provocation pour les concurrents.
Un expert judiciaire pour le label « Meilleure chaîne de magasins »

La contestation de la pub télévisée des produits Lidl n’est pas le seul front ouvert par Carrefour. Le leader français de la distribution s’interroge également sur le label de «Meilleure chaîne de magasins de l’année» que met en avant son rival dans toute sa communication. Ce titre lui est décerné, dans la catégorie hypermarchés et supermarchés, à l’issue d’une étude menée auprès de consommateurs interrogés par Q&A Research & Consultancy. Le groupe dirigé par Georges Plassat a décidé de regarder cela de plus prêt. En quelques mois, le nombre de sondés est passé de 27.000 à 159.161 personnes. Pour en avoir le cœur net, il a donc demandé la nomination d’un expert judiciaire au Pays-Bas où est basée cette société afin de comprendre la méthodologie. Et s’assurer que ce ne sont pas des robots qui cliquent à la place des humains.

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